Mali: A la découverte des dogons, le peuple le plus énigmatique de l’Afrique de l’ouest.(Partie 1)

  • Par Saidi Mamadou Ouedraogo
  • 07 Janv. 2020
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Estimé à environ 700 000 individus selon les Nations Unis, le peuple Dogon constitue à n’en point douter la frange de la population Malienne la plus mystérieuse.


Il est principalement localisé dans une zone appelée « le pays dogon » qui part du Centre-est du Mali dans la région de Mopti, plus précisément à Bandiagara, jusqu’au Sud-ouest de la boucle du Niger. Les Dogon sont originaires du Mandé. Depuis le XIVe siècle, ils ont migré vers les falaises de Bandiagara. De là ils se sont dispersés vers le Sud ouest de la boucle du Niger et le Nord-ouest du Burkina Faso pour fuir l’islamisation.

Mode de vie des Dogons

Les Dogons sont avant tout des cultivateurs de petit mil, de sorgo et de riz, ainsi que d'oignon et de quelques autres légumes peu exigeants en eau. Le mil, qu'ils entreposent dans des greniers, est la base de leur alimentation, mais la culture de l'oignon (qui représente près d'un tiers des surfaces cultivables de la falaise) est essentielle à leur économie, puisqu'ils sont exportés dans les villes des alentours et servent de monnaie d'échange avec les autres ethnies (par exemple pour l'achat de poissons avec les Bozos). Ils élèvent aussi du petit bétail, surtout des moutons et des poulets. Les bovins et les ovins sont confiés aux Peuls vivant plus bas, en plaine. Les Dogon pratiquent aussi l'apiculture.

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Traditionnellement, les Dogon sont aussi des forgerons réputés. Une étude récente a mis en évidence la production de fer et d'outils en fer forgé du temps des Tellems (premier habitants des falaises de Bandiagara), au VIe siècle, production devenue quasi industrielle du XIVe au XIXe siècle à l'époque dogon. Il apparaît que diverses techniques de récupération du fer, à partir du minerai trouvé en divers endroits de la falaise de Bandiagara, aient été mises au point dans différents villages parfois séparés de quelques dizaines de kilomètres. Cette production, déjà avérée sur le site de la falaise pendant plus de mille trois cents ans (à raison d'environ 15 tonnes estimées par an), permet de mieux comprendre le statut particulier et respecté des forgerons dans la société dogon, ainsi que les échanges commerciaux que pratiquaient les Dogon. Le tissage du coton est l’affaire des hommes. Les tisserands installent leur métier à tisser sur la voie publique. Dans les villages, le marché a lieu tous les 5 jours, ce qui correspond à la semaine dogon. La lutte traditionnelle est très pratiquée par les garçons et les jeunes hommes. Des tournois réguliers sont organisés entre quartiers et entre villages.

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Ils sont réputés pour leur cosmogonie et leurs sculptures. Leur langue parlée est le Dogon qui regroupe plusieurs dialectes. Il existe aussi une langue secrète, le sigi so, langue réservée à la société des masques (les awa). Les Dogons sont liés avec l’ethnie des Bozo par la « parenté à plaisanterie » (appelée sinankunya au Mali). Dogon et Bozo se moquent réciproquement, mais parallèlement, se doivent mutuelle assistance.

L’Architecture Dogon

L'architecture dogon est spécifique. La plupart des villages sont implantés dans la falaise et accessibles par des chemins escarpés qui empruntent les failles du plateau ou par des chemins tout à fait accessibles.

Les portes des cases traditionnelles dogons sont recouvertes de message sous forme de figurines sculptées dans le bois et qui retrace leur histoire. A la question de savoir pourquoi ces sculptures ne sont pas faite sur les murs, la réponse des sages fut celle-ci :« Tout le monde est en contact permanent avec la porte, nous voyons obligatoirement les messages, nous les touchons et ainsi nous sommes en contact permanent avec notre histoire ».

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La case traditionnelle est organisée autour d'une cour et chaque femme a son grenier (avec une seule porte) auquel le mari n'a pas accès. Le grenier du mari (avec deux portes et généralement plus grand) sert à conserver le mil ; le grenier des femmes sert, lui, à conserver les condiments et différents objets. Les greniers sont clairement identifiables par leur toiture en seko (paille), celui du mari étant en général, le plus important. Il existe différentes sortes de greniers (appelés gôh) d'architecture spécifique, et ayant une attribution et une symbolique particulières.

Le Toguna (ou case à palabres) est une construction ouverte érigée en général au centre des villages dogons se trouvant le long de la falaise de Bandiagara. Elles sont d'une hauteur insuffisante pour se tenir en position debout de façon à obliger les participants à s'asseoir. C'est le lieu où les sages du villages débattent des problèmes de la communauté, il peut servir également de lieu pour la justice coutumière. C'est aussi et surtout une zone centrale du village, ombragée, où les vieux du village passent les heures chaudes de la journée en parlant les uns avec les autres. Il est constitué de 8 piliers gavées de figures symboliques et de 8 couches de chaume en guise de toit. Le chiffre huit fait represente le nombre des premiers ancêtres des dongons. 

La mythologie dogon 

Au commencement, le Dieu Amma fit des hommes des créatures immortelles. Parvenus à un âge avancé, ils se transformaient en serpents, accédant ainsi au monde des génies (yéban). L'ancêtre le plus ancien auquel se réfère la mythologie des dogons, Lébé Séru, a donné naissance à deux fils. L'aîné engendra les tribus : Dyon, Domno (ou domdo) et Ono. Les descendants du plus jeune forment la tribu Arou. Par la faute de ses enfants, le second fils se transforma prématurément en serpent qui ayant lui-même rompu un interdit en mourut. De ce fait, la mort apparut dans le monde des hommes et lorsque vint pour l'ancêtre Lébé Séru le moment de sa transformation, il ne put l'accomplir. Il mourut sous sa forme d'homme et fut enterré ainsi.

Lorsque les dogons, qui vivaient jusqu'alors dans le Mandé, ont décidé de migrer pour fuir l'islamisation, ils voulurent emporter avec eux des ossements de leur aïeul. Mais Dyon, ayant creusé la tombe, y trouva seulement un grand serpent vivant : le serpent lébé. C'est ce serpent lébé qui guida le peuple dogon depuis le Mandé vers la falaise de Bandiagara où ils sont aujourd'hui établis.

Les dogons sont aussi réputés pour leurs connaissances sur la composition de l’univers. Les connaissances des sages dogon sur l’étoile Sirius et son compagnon Sirius B, découvertes en 1862, n’ont pas fini de surprendre l’ethnologue français Marcel Griaule qui a vécu 15 ans avec eux afin de les étudier.   

A suivre!

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