Portrait: à la découverte de Wanne, la peintre qui sublime par le fil

  • Par Ethmane Issa
  • 15 Août 2022
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Si peindre avec le pinceau est un art, le faire avec le fil de pêche semble être une science. Artiste-peintre, Wanne nous emmène dans son univers artistique. Entre le beau et le piège qu’il y a, elle mise sur une analyse profonde.


Professeur d’art plastique de formation, la peinture est pour Wanne AÏDA Maimouna, ce qu’est l’eau pour le poisson. A découvrir ses tableaux, nul doute, cet art s’enracine dans ses veines jugulaires. Le mystère de fil de pêche, nous l’avons découvert avec elle, lors de la quatrième édition du Salon des Grands Cimaises d’Abidjan, SGCA. Ce mercredi, à son domicile, elle nous livre tout le secret de son Art dont elle est la seule à savoir.

Enseignante d’art plastique à Bingerville, ville dans laquelle elle y réside depuis quelques années, Wanne passe du temps entre l’enseignement et la peinture. Avec pour seuls compagnons sa toile, son aiguille et le fil de pêche, l’artiste ivoirienne extériorise ses pensées. Elle peint du figuratif et, avec le fil de pêche comme matière première. Pour le commun des mortels, ce matériau au bout duquel est suspendu un appât, est un piège pour s’emparer du poisson. Pourquoi Wanne utilise cette technique ? Et encore, avec le visage des perles dont on dit qu’elles sont l’incarnation de la beauté. Qu’est-ce qui se cache derrière cette apparence et ces nombreuses couleurs ? Selon elle, « La société actuelle allie beauté et piège. Que ce soit dans les domaines éducatif, esthétique, marital et même politique. Il faut, à un moment donné marquer une pause, pour arrêter de bonnes décisions et non celles qui peuvent nous détruire après »

Ne pas se comporter comme un poisson au risque d’être absorbé par un piège est la quintessence de son Art. Dans une société engluée de pièges, où le visage de celle-ci n’est que la face de l’iceberg, à l’image de son Art, Wanne attire l’attention de tous à analyser dans les moindres détails et revenir aux valeurs intrinsèques. « J’utilise le fil de pêche parce que c’est comme instrument de piège. Outre la beauté de ces tableaux, il y a un piège auquel il faut faire attention. Il y’a quelque chose de sournois qu’il faut cerner et canaliser de peur de perdre nos repères et se retrouver avec une société instable. »

L’attente, la résilience, la réflexion sont celles qui nourrissent la pensée de Wanne. Et ses tableaux en sont ses répercussions quand celles-ci enchantent sa matière grise.

L’attente : « L’attente pour dire que nous sommes en attente de solutions. Une société qui attend d’être soignée. Le visage humain avec le jeu de couleurs, traduit ici celui de la société et ses différents aspects. »

La résilience : « La résilience pour dire qu’on peut revenir. Nous avons un devoir d’éducation ou de rééducation de la société. Il faut qu’on ait une société stable. On ne fait pas que dénoncer. On est aussi capable de prendre de bonnes décisions pour changer l’ordre des choses. On n’est pas obligé de copier l’occident… »

La réflexion : « Réflexion, il faut qu’on s’asseye pour réfléchir, prendre de bonne décisions par rapport à notre société. Ici, je mets un accent sur le domaine éducatif. En tant qu’enseignante, je sais plus ou moins les maux qui entravent notre écosystème éducatif. Cette décision n’est pas que les décideurs mais tout le monde est interpellé… »

A la question de savoir la chance que peut avoir la femme, singulièrement la jeune fille dans ce milieu beaucoup plus prisé par les hommes, Wanne, fort de son expérience loue plutôt les initiatives de ces hommes en faveur des jeunes qui veulent embrasser ce métier et faire une belle carrière. « Cependant le talent peut mourir lorsqu’il n’est pas exploité. Alors, le travail ! » A-t-elle lâché.

Dans cet environnement où la culture de la créativité, de l’art ne semble pas intéresser un quart de la population, Wanne invite les amoureux de cette discipline à faire preuve de persévérance et de résilience comme son tableau l’illustre bien. Consciente de toutes ces peaux de banane sur son chemin, l’artiste croit en son étoile et promet donner le meilleur pour être sommet de son art. Wanne rêve un jour, d’écrire son nom dans le livre d’or de la culture ivoirienne.

 

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